Abel Ferrara et les figures du Mal (Abel Ferrara and his thematic elements)
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The article below by Dominique Vergnes, titled "Abel Ferrara et les Figures du Mal" has appeared on the Suite101.fr French website on September 25th, 2010.
At the occasion of Abel Ferrara's visit at the International Festival of La Roche sur Yon in France in October 2010, the writer chose to analyze the filmmaker's thematic elements and favorite topics.
Original French article:
Abel Ferrara et les figures du Mal
25 sept. 2010 Dominique Vergnes
Abel Ferrara sera présent lors du Festival international de La Roche-sur-Yon en octobre prochain, l'occasion de se pencher sur ces thématiques filmiques.
En effet, Abel Ferrara a posé, tout au long de son oeuvre, la question du Mal et de sa prégnance. Son film le plus emblématique en ce sens reste "The Addiction".
Le cinéma de Ferrara reste unique, d'abord parce qu'il dépeint: il isole ses personnages comme autant de sujets. Il cherche à montrer l'acte déviant; il dessine dans tout ses films une hyperbole du Mal avec ses différentes figures et déclinaisons.
Dépendance:
Les personnages de Ferrara sont toujours pris dans des situations inextricables. L'"addiction" impose ainsi la dépendance comme une des figures-clés de l'œuvre de ce cinéaste. Ces personnages sont le plus souvent enfermés dans des codes du cinéma de genre, et le plus souvent, ils ne peuvent jamais s'extraire des conditions dans lesquelles ils sont placés (déterminisme social et culturel). C'est ce qu'annonçait déjà "Ms 45" ("L'ange de la vengeance"): "Aucun homme ne sera plus jamais en sécurité". A une quinzaine d'années d'intervalle, Casanova (Annabella Sciorra) dans "The addiction" le confirme en une formule cinglante: "No option" ("pas de choix").
Les personnages ferrariens sont enfermés, conditionnés par les codes stricts du cinéma de genre. En effet, l'œuvre de Ferrara découlent de bons nombres de styles (le plus souvent d'ordre criminel), dont on reconnaît des motifs habituels: "Driller Killer" ("New-York deux heures du matin") et "Gladiator" (le télé film "Le Justicier de la route") présentent des sérial-killers traditionnels.
"M45" est ainsi d'abord une errance meurtrière dans la ville de New-York à partir d'un trauma initial (viol d'une femme et vengeance afférente); "MS45" et "Gladiator" dérivent en même temps des films d'autodéfense et de vengeance; "King of New-York" nous décrit le retour aux affaires d'un caïd sorti de prison; "Bad Lieutenant" est une variation encore sur le thème du policier ultra-corrompu; "The funeral" ("Nos Funérailles") s'articule autour de règlements de compte dont est victime et se venge une famille de gangsters dans les années 1930 à New-York, "New Rose Hôtel" mêle des thèmes propres aux films d'espionnage industriel, à la préparation d'un gros coup, etc...
Les films qui ne procèdent pas du cinéma criminel s'inscrivent aussi dans ce cinéma de genre: "The Addiction" renouvelle ainsi la thématique du vampire et "Body Snatchers" propose la troisième version d'un même thème de science-fiction, c'est-à-dire l'invasion et la possession d'extra-terrestres dans des corps humains.
Aux thèmes généraux de ces films viennent s'ajouter des figures ou situations habituelles: un tueur psychopathe qui cherche à nettoyer la ville et l'identification de celui qui le traque ("Fear City"); à retenir aussi les images typiques d'une procession à l'italienne perturbée par l'intervention de tueurs, des séries de codes rappelant la fierté de l'appartenance aux communautés italo-américaine, noire ou irlandaise ("China Girl", "King of New-York") etc...décrivant ainsi les différents quartiers de New-York et ses communautés éthniques.
Que Matt Rossi (Tom Berenger) dans "Fear City" soit un ancien boxeur ayant tué accidentellement un adversaire évoque immédiatement des souvenirs fameux aux cinéphiles (Film Noir des années 1940 et 1950), et que l'assassin dont il a triomphé tombe de la même manière que le boxeur mort sur le ring constitue un parallélisme très connoté et anxiogène.
Un déterminisme puissant
Dans les films de Ferrara, le genre policier est là comme une donnée intrinsèque et les personnages de ces films sont marqués par ce déterminisme très fort (pas d'issue possible pour les flics et les gangsters).
Ainsi, c'est flagrant dans "China Girl" avec l'antagonisme inter-éthnique présenté comme point de départ: dans ce film, la frontière très nette entre quartier chinois et italien est fixée d'emblée, permettant au réalisateur d'annoncer la rivalité qui perdra les protagonistes du film.
Ainsi, les genres très codés facilitent l'énoncé de départ puisque les vampires restent malfaisants par nature (comme dans "The Addiction"), et les extra-terrestres sont malintentionnés par essence (exemple de "Body Snatchers").
Dans les films traitant du couple, il n'y a pas à attendre longtemps pour que les querelles, les disputes incessantes apparaissent ("Snake Eyes"). Le personnage du "Bad Lieutenant" est la quintessence du flic pourri, il est tel un personnage standard du Cinéma Noir.
Ainsi, un des thèmes récurrents dans l'œuvre de Ferrara demeure l'addiction, le manque et aussi la dépendance. Si le manque lié aux stupéfiants est dominant ("Bad Lieutenant", "The addiction"), s'y ajoute l'alcool ("The Blackout"). Dans "Bad Lieutenant", le policier sniffe, fume du crack et se shoote, mais il est également alcoolique notoire.
- Reproduced with the authorization of the author.
Full article on the original website
Full article translated into English by Jennifer Bourne:
Abel Ferrara and his thematic elements
September 25, 2010. By Dominique Vergnes.
Abel Ferrara will be at the International Festival of La Roche-sur-Yon next October. This will give me the opportunity to look into the thematic elements in his films.
Throughout his work, Abel Ferrara asked the question, "What is Evil?" His most emblematic film on this topic remains to be "The Addiction".
Abel Ferrara's style is unique, because the characters in his films are more than just characters; they represent something deeper. He tries to show deviant acts and draws in all his films a hyperbole of the Evil with his different faces.
Dependence
Ferrara's characters are always stuck in tricky situations. "The Addiction" shows dependence as one of the key faces of the filmmaker's work. The characters can never extract themselves from the conditions they are in (social and cultural determinism). The tag line for "Ms. 45" announces "No man will ever be safe again": the main character, and therefore, her quest to kill men, is influenced by her environment and what happens to her. Fifteen years later, Casanova (Annabella Sciorra) in "The Addiction" confirms: "No option", no choice. Ferrara's characters don't have the ability to choose their own path.
Ferrara explores several themes in his films, which are often related to crimes, over and over again: "Driller Killer" and the TV movie "The Gladiator" show traditional serial killers.
“Ms. 45" is about a deadly wandering in New York City caused by a trauma (the rape of a woman and a revenge); "King of New York" describes how a man, fresh out of jail, goes back into business; "Bad Lieutenant" evolves around the theme of a corrupt policeman; "The Funeral" focuses on a gangster family in the 1930's in New York; "New Rose Hotel" relates more to industrial espionage films.
However, in "The Addiction," Ferrara explores a different topic and goes back to the vampire theme. In "Body Snatchers", which can be considered science-fiction, he studies aliens invading human bodies.
Typical situations are added to some of the themes above: a psychopath murderer wants to "clean" the city and eradicate the one who is tracking him ("Fear City"); killers messing up an Italian-style procession: a series of codes recalling the pride of being a member of the Italian-American, black or Irish communities("China Girl", "King of New York"), with a description of the different New York neighborhoods and its ethnic communities.
Matt Rossi (Tom Berenger) in "Fear City", a former boxer who had accidentally killed his rival, immediately reminds to movie aficionados the 'Film Noir' genre in the 1940's and 1950's.
A powerful determinism
In Ferrara's films, the suspense/thriller genre is always an essential part, and the characters are influenced by it.
In "China Girl," for example, there is a very clear line between Chinese and Italian neighborhoods from the beginning, which is used by the filmmaker to show the rivalry between the characters.
Knowing the themes of Ferrara's movies and their strict codes, we know what to expect: while vampires are harmful by nature and always will be (as in "The Addiction"), aliens (as in "Body Snatchers") are known to have bad intentions towards humans.
We can see the same patterns in movies about relationships where fights and arguments appear very quickly ("Snake Eyes"). There is also the perfect example of the character of "Bad Lieutenant", a cliche of a corrupt cop as one can find in the Film Noir genre.
One of the recurrent themes in Abel Ferrara's work remains the addiction, either with drugs ("Bad Lieutenant", "The Addiction"), or alcohol ("The Blackout"): in "Bad Lieutenant", the policeman is doing drugs, but he is also an alcoholic.